Source : Le Particulier – samedi 1 avril 2023
Face à la crise énergétique et la hausse des prix de l’électricité, s’équiper en panneaux photovoltaïques apparaît de plus en plus attractif. Mais cet investissement très coûteux requiert une fine analyse de ses besoins. Pauline Janicot
Les installations de panneaux solaires chez les particuliers sont en forte croissance.
60 000 nouveaux équipements ont été recensés par Enedis en 2022, ce qui porte à plus de 200 000 le nombre de propriétaires qui utilisent leur propre production d’électricité, contre 3 000 en 2015. Comment expliquer un tel engouement ? « La hausse du prix de l’électricité, une démarche écologique ou encore la volonté de réduire sa dépendance vis-à-vis du réseau
collectif sont régulièrement évoquées par ceux qui nous sollicitent », explique Gautier Villard, en charge de la rénovation énergétique et solaire pour la plateforme Hello Watt.
Sur le papier, s’équiper de panneaux photovoltaïques permet de réduire sa facture et de rentabiliser son investissement en une dizaine d’années, en moyenne, sachant qu’une prime dite d’autoconsommation est versée depuis 2017 aux foyers qui vendent leur surplus d’électricité. Pour réussir sa conversion, il convient de mettre soigneusement en adéquation ses besoins et son installation.
Consommez et vendez l’énergie
Lorsque vous installez des panneaux sur votre toiture, trois options s’offrent à vous pour utiliser votre production d’électricité. La première, l’autoconsommation totale, est actuellement trop onéreuse. En effet, les panneaux fournissent de l’énergie durant la journée alors que les foyers en consomment surtout le matin et le soir.« Cela nécessite donc d’investir dans des batteries qui permettent de stocker le surplus d’électricité produite pour la rendre disponible à tout moment. Mais leur coût est très élevé et peut faire doubler la facture globale. Par ailleurs, avec cette option, vous ne recevez aucune aide de l’État », souligne Anne-Claire Faure, chargée de projet photovoltaïque au sein de l’association Hespul.
La deuxième option, souvent la plus rentable, consiste à vendre la totalité de sa production à EDF Obligation d’Achat notamment, dont le contrat dure 20 ans. Les tarifs ont été récemment revalorisés et permettent de toucher 23,49 centimes d’euro par kilowattheure (kWh) pour une installation qui atteint 3 kilowatt- crêtes (kWc) au maximum, soit l’équivalent d’une douzaine de panneaux (19,96 centimes d’euro si elle est comprise entre 3 et 9 kWc).
La troisième option, plébiscitée par les particuliers, consiste à autoconsommer une partie de sa production et à injecter le surplus dans le réseau collectif en le vendant au tarif d’achat fixé par l’État. Ce dernier, réévalué tous les trimestres, est désormais indexé sur l’inflation pour les projets dont la demande de raccordement a été déposée après le 1er novembre 2022. Le rachat s’élève à 13 centimes d’euro par kWh jusqu’au 30 avril 2023 (contre 10 centimes d’euro en 2022). Notez que pour obtenir ce tarif, l’installation doit être réalisée par un artisan reconnu garant de l’environnement (RGE).
Quant à la prime à l’investissement attribuée pour chaque installation d’une puissance inférieure à 100 kWc, elle a également été revalorisée (arrêté du 8.2.23, JO du 17). Elle est désormais versée en une seule fois (elle était étalée sur 5 années auparavant) et son montant atteint 500 € par kWc (jusqu’à 3 kWc) et 370 € (entre 3 et 9 kWc), ce qui représente entre 10 et 15 % du coût total du projet (voir nos exemples p. 59).
Ne surestimez pas votre consommation
« L’option qui consiste à vendre son surplus est intéressante, mais elle implique d’optimiser son autoconsommation, souligne Joël Mercy, président du Groupement des particuliers producteurs d’électricité photovoltaïque (GPPEP). Malgré sa récente indexation sur l’inflation, la vente d’électricité reste aujourd’hui peu rémunérée. » Certes, il existe certains appareils qui permettent de programmer votre lave-vaisselle, votre lave-linge ou encore votre ballon d’eau chaude pour qu’ils fonctionnent durant la journée. Mais ce type d’équipement a un coût important. « Comptez, par exemple, autour de 2 000 € pour une box domotique qui déclenche les appareils. Il faut aussi vérifier que son électroménager soit bien compatible avec ce type de programmateur », précise Anne-Claire Faure. Sachez aussi que, même optimisé, le taux d’autoconsommation atteint rarement les 70 % régulièrement évoqués par les vendeurs de panneaux dans leurs simulations. Plus prudente, l’association Hespul estime à 30 % l’énergie produite et consommée pour une installation de 3 kWc.
Choisissez la puissance ad hoc
Avant d’investir dans des panneaux solaires, il faut estimer vos besoins et votre consommation d’électricité. Quel est votre mode de chauffage ? Avez-vous un véhicule électrique ou une piscine ? Tous ces éléments vont vous permettre de déterminer le nombre de panneaux dont vous aurez besoin et de choisir la meilleure option. Si vous êtes chauffés au gaz, l’opération sera notamment moins intéressante, comme le démontrent les simulations réalisées par la plateforme Hello Watt (voir ci-contre), sauf à investir dans une pompe à chaleur, ce qui engendre d’autres coûts. Votre localisation, l’orientation des panneaux (idéalement sud, sud-est ou sud-ouest) et leur inclinaison (la production est optimisée à 30°) entrent aussi en compte pour déterminer la puissance la plus adaptée sur votre toiture ou ombrière, sachant que celle d’un panneau standard oscille entre 200 et 300 watt-crêtes.L’Agence de l’environnement et de
la maîtrise de l’énergie (Ademe) souligne que dans les zones géographiques moins ensoleillées, il faut prévoir une surface de panneaux plus importante pour obtenir la même quantité d’énergie électrique que dans un lieu largement exposé. Il faut aussi éviter les zones perpétuellement à l’ombre, hiver comme été.
Réalisez plusieurs devis
En 10 ans, le tarif des panneaux photovoltaïques a été divisé par dix. Mais depuis quelques mois, ils repartent à la hausse en raison de l’augmentation du coût des matériaux. Or leur prix d’achat pèse sur la rentabilité de l’opération.« Certains vendeurs n’hésitent pas à gonfler leurs tarifs, profitant de la forte demande des particuliers », avertit Anne-Claire Faure, de l’association Hespul. Pour avoir une idée des prix moyens des panneaux, consultez le site Photovoltaïque.info, conçu par l’Hespul et l’Ademe, qui fournit des informations très utiles. Pour une installation de 3 kWc, comptez autour de 9 000 € (21 000 € pour 9 kWc). Notez qu’une TVA réduite à 10 % s’applique aux toitures équipées de modules d’une puissance inférieure ou égale à 3 kWc (au-delà, elle est de 20 %). À côté de panneaux solaires, l’installation comprend aussi un onduleur (boîtier) qui sert à transformer le courant continu produit en courant alternatif identique à celui du réseau collectif. Des micro-onduleurs fixés sur chaque panneau sont aussi commercialisés. Ils ont l’avantage d’optimiser l’utilisation de chaque module mais leur prix est également plus important.
Certains installateurs proposent de vous accompagner durant toute l’opération, du dimensionnement du projet à la pose des panneaux en passant par leur raccordement. « Nous réalisons notamment toutes les démarches administratives obligatoires, comme demander l’autorisation à la mairie ou solliciter l’avis des architectes des bâtiments de France si vous habitez près d’un monument historique ou dans une zone protégée », souligne Kate directrice du marketing et de la communication d’EDF ENR. Avec la hausse continue des tarifs de l’électricité, le secteur de l’énergie solaire est en pleine ébullition et attire de nombreux acteurs.
« Avant de choisir votre installateur, n’hésitez pas à faire au moins deux ou trois devis pour
pouvoir comparer les coûts car on voit réapparaître certaines arnaques », avertit Joël Mercy. Vérifiez que l’artisan a bien souscrit une garantie décennale. Il doit de préférence être certifié (Qualibat, Qualifelec…). « Il faut privilégier de préférence les opérateurs locaux et être patient. Les carnets de commandes des bons professionnels sont généralement pleins pour des mois », souligne Joël Mercy. De même, n’acceptez jamais un rendez-vous après un démarchage téléphonique. Ne signez pas non plus de devis à l’occasion d’une foire ou d’un salon où les vendeurs sont parfois très insistants. Attention, financer l’achat de panneaux à crédit s’avère aussi risqué car les simulations des vendeurs sont souvent trop optimistes. Vérifiez sur le site photovoltaïque.info que ces dernières sont bien réalistes.
Ne négligez pas les frais annexes
Pour calculer le coût total de votre installation, n’oubliez pas certaines dépenses comme celles de raccordement à Enedis. Si vous vendez toute votre production, des coûts liés au branchement de l’installation sont facturés (entre 500 et 1 500 €). Le gestionnaire de réseau facture aussi le tarif d’utilisation du réseau public d’électricité (Turpe) qui s’élève autour de 40 € par an (injection de la totalité) et de 11 € par an (injection du surplus). Tous les 10 ans environ, vous devrez probablement faire réparer ou remplacer votre onduleur. Selon l’Ademe, son prix moyen est de 0,30 à 0,60 €/watt. Il faut aussi penser à déclarer vos panneaux solaires dans votre multirisque habitation, ce qui peut entraîner une surprime de 50 € au maximum. Sachez que si la puissance de votre installation ne dépasse pas 3 kWc, vous bénéficiez d’une exonération d’imposition sur le revenu de la vente de votre production d’électricité à EDF. Mais au-delà de 3 kWc, le montant total vendu doit être déclaré et est imposable à l’impôt sur le revenu.