Pour Pékin, ce secteur est stratégique. Le pays maîtrise toute la chaîne de valeur et a laminé les Occidentaux. Par Harold Thibault (Nantong, envoyé spécial du journal Le Monde)
Les machines s’activent sous le regard d’employés soucieux d’identifier le moindre défaut. La production se fait couche par couche. Les cellules photovoltaïques, livrées par un fournisseur situé à seulement quelques dizaines de kilomètres, sont sorties des cartons avec précaution. Elles sont connectées ensemble par des fils métalliques conducteurs. Il faut les souder, poser ensuite une plaque de verre spécial, une autre de matériau encapsulant les cellules, disposer les cellules elles-mêmes, encore du matériau protecteur et encore du verre. Et finalement, une feuille qui, une fois fondue sur le produit dans une pièce à la chaleur écrasante, sera le dos du panneau. La production est largement automatisée, sur des machines elles aussi faites en Chine, mais il convient de la vérifier minutieusement, c’est là que se joue la qualité. La trentaine de travailleurs sur les lignes d’Eco Green Energy, quarante-cinq lorsqu’il y a des pics de production, contrôle chaque étape, à l’œil nu ou au scanner.
L’usine, implantée dans un parc industriel de Nantong, en face de Shanghaï sur l’immense estuaire du fleuve Yangzi, est l’un des nombreux sites du secteur dans la région : la production de panneaux solaires se déroule désormais pour l’essentiel en Chine. Selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE), en 2021 les trois quarts des emplois de cette industrie y étaient situés. Les entreprises chinoises ont par ailleurs délocalisé une partie de la production finale en Asie du Sud-Est pour échapper aux barrières érigées par Washington contre les importations venues de Chine, de sorte que le reste de l’Asie récupère 14 % des emplois restants. N’en laissant à l’Europe que 3 % et aux Etats-Unis 1 %, alors que l’énergie solaire est présentée comme une des clés de la transition énergétique, et donc du XXIe siècle.